mardi 2 juin 2015

Les films de la nostalgie japonaise Part II- Café Lumière de Hou Hsiao-hsien


 Synopsis : Yoko revient d'un séjour à Taïwan. La jeune femme visite une librairie à Jimbocho, le quartier des bouquinistes de Tokyo. C'est Hajime qui dirige la boutique. Ce garçon silencieux enregistre le bruit des trains qui traversent la ville.
Après le divorce de ses parents, Yoko avait été élevée par son oncle devenu aveugle, à Yubari, dans l'île d'Hokkaido, au nord du pays. Aujourd'hui, elle reprend contact avec son vrai père et sa nouvelle épouse.
Yoko fait une recherche sur le compositeur taïwanais Jiang Ewn-Ye, qui travailla un certain temps au Japon. Hajime aide Yoko dans ses travaux. Ils s'entendent bien et fréquentent ensemble les nombreux cafés de Tokyo...
C'est la fête d'Obon, Yoko est de retour chez son père. Elle lui annonce qu'elle est enceinte d'un Taïwanais et qu'elle souhaite garder l'enfant pour l'élever seule. Son père et sa belle-mère semblent inquiets...
Après une partie I (ici) et un bonus (), ce film rentrera dans mon challenge "spring-summer wars : la nostalgie nippone".

Café Lumière est un film réalisé en 2000. Sa particularité est d'avoir été réalisé au Japon en mémoire de Yasujiro Ozu pour le centenaire de sa naissance... Par un réalisateur  taiwanais, Hou Hsiao-hsien*.

Je l'ai vu dans les salles à l'époque, avec une amie japonaise, alors que je débutais l'apprentissage de cette langue ; et nous nous étions interrogés sur le lien avec Ozu. En un sens, le "fils spirituel" d'Ozu m'apparaît être Kore Eda Hirokazu, connu en occident bien plus tard.

Pour ce film de Hou Hsiao-hsien, nous nous demandions où se trouvait le lien avec l'esthétique toute japonaise, le resserrement avec le sujet lors des dialogues, les caméras tatamis (peut-être dans certains plans de Café Lumière, mais je ne suis pas un spécialiste), une histoire centrée sur une famille et un événement qui lui arrive. Et puis la vie continue...

Certaines réflexions prennent du temps et revoir ce film m'a rappelé le décalage entre l'appréciation de l'oeuvre d'Ozu que font les critiques de cinéma occidentaux et japonais. Quelque part Hou Hsiao-hsien a probablement une façon d'aborder "l'anti-cinéma" proche d'Ozu.


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Quant au film, il fut à l'époque déstabilisant (1) par son absence de vraie ligne dramatique : il s'éloigne ainsi des théories de Joseph Campbell et des recettes qui font l'intrigue d'un film grand public.

Nous découvrons le parcours de Yoko (HITOTO YÔ, chanteuse taiwano-japonaise) et hajime (ASANO Tadanobu, que l'on ne présente plus) pendant quelques instants de grâce, sans que quoique ce soit ne soit accompli. Le réalisateur inclut d'ailleurs dans le film une longue scène finale où nous suivons nos deux personnages sans aucune parole. Rien n'est achevé et tout est encore à faire.

Quant à moi, j'ai apprécié ce film calme et légèrement hors norme, qui a su saisir une atmosphère particulière du Japon. Ainsi du regard sur un des rares tramways tokyoites qui restent (toden-arakawa). Celui-ci dessert un quartier resté très populaire (Minowa). Ou alors de certaines scènes qui rentrent dans l'intimité - sans voyeurisme - de la cellule familiale.
 

* A l'exception de ce film, j'ignore tout de son oeuvre

(1) Certains spectateurs quittèrent d'ailleurs la salle en cours de route sans y trouver leur compte. Un ami qui avait vu le film l'appréciait beaucoup dans ces termes "c'est génial ! Il n'y s'y passe rien".